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Raconter le théâtre d'Yves-Noël Genod
par Jean Pierre Ceton
Yves-Noël Genod, à propos de son dernier spectacle - 1er avril - montré
/ monté à Bruxelles (La Raffinerie, rue de Manchester), sur Fb: Voici une
phrase que Marlène dit dans le spectacle : « Si je m’fous en
l’air, vous allez être bien embêté avec votre équipe de
tapettes ». Et voici une phrase que chante Jeanne dans le spectacle
: « Et même ton chagrin te semblera demain ultra merveilleux ».
Vous avez l’idée, écrit-il!
...
En pénétrant dans le lieu, il nous est conseille de choisir les
chaises situées sur le côté gauche du plateau, tandis que d'autres
spectateurs s'installeront par la suite en position
habituelle, frontale. Cela se révélera un choix stratégique, car en position latérale on voit tout le plateau et, en plus, l'espace du côté droit grand ouvert vers
les loges, la machinerie, l'extérieur. Là où il se passe pas mal de choses, à savoir une
partie du
spectacle qui se déroule par conséquent hors cadre.
Ceci pour dire qu'il se passe toujours quelque chose hors instance dans les spectacles de Y-N G. Le
spectacle commence
avant de commencer, les acteurs se baladent, se préparent surement,
pas forcément sur le plateau, on les aperçoit passer à travers les
portes, sortir rentrer des loges ou autres annexes, on entend le début
d'une chanson, un néon clignote à la manière d'un néon en panne, des
stuffs commencent à
descendre des cintres.
La première donnée,
c'est l'utilisation de l'espace tous azimuts, c'est-à-dire à l’extérieur du
plateau, au-dessus du plateau, dans les cintres et bien sûr à tous
les coins du plateau, encore qu'il arrive parfois que le plateau,
déserté, figure à lui seul dans sa coquille quelque chose, quoi, cette coquille?...
Là
où l'on est / où l'on nait. L'univers, le grand et celui de chacun? Le
monde de la vie ?
La
seconde donnée, c'est la multiaction. Les tableaux sont des séquences
durant
lesquelles diverses actions se déroulent en même temps. Elle ne sont ni
antagonistes
ni forcément corrélatives. Elle sont ensemble. On a le regard qui doit
poursuivre les différentes actions, passer de l'une à l'autre.
C'est
de la vie
dont il s'agit, assurément. C'est joué, complétement joué, mais c'est de la vie, peut-être
plus
de la vie qu'ensuite au bar où l'on se retrouve entre gens qui pourtant sont bien vivants et natures et tout.
Là, sur le plateau, les portes de la liberté sont ouvertes aux individus
qui interviennent à leur guise, qui se dénudent ou s'habillent pour
mieux être nus, pour mieux être eux-mêmes.
Car ce sont des
individus qui figurent des dizaines de séquences, plus ou moins
improbables, qui ressemblent à des situations de vie, des corps se bagarrent, sommeillent ou sautent, une
chanteuse chante soutenue puis enlevée par d'autres corps, une matrone morigène un enfant, des êtres marchent, déambulent, se
plaignent, exultent ou délirent...
L'envie peut leur prendre soudainement
de s'adresser aux murs ou bien de sortir du cadre, de s’échapper, de
grimper les échelles vers les cintres. Comme l'un d'eux qui n'oublie
pas de se dénuder en arrivant tout en haut pour ensuite faire tomber
comme neige, gélatines, voiles et autres items colorés.
On
capte des bribes de
phrases, drôles, le plus souvent à mezzo voce. Ou bien très fort parfois, comme le fait
Marlène à un moment sans que ce soit fait pour être compris davantage.
On peut y voir des figures
de mimes aussi, le chef d'orchestre, le nageur, le maquilleur, je
pourrais en inventer que peut-être je n'ai pas vues: une
famille heureuse, un homme tracassé, une femme désirante, un couple
très amoureux, un metteur en scène jouant son rôle, un écrivain
exalté...
La
musique s'y ajoutant, des effets lumière et même de fumée en plus, un enfant qui enflamme le tout, c'est ainsi qu'un fil s'est
construit, produisant poésie et mélancolie, à la fois plainte et
amour, désespoir et lucidité...
Comment autrement raconter ce qui fait qu'en fin de spectacle
une impression d'euphorie me prend? Surement parce que c'est drôle, c'est
fun, parce que se ressent le plaisir de voir ça. Le plaisir de le vivre d'une certaine façon.
Donc, sortir sous le
coup d’une exaltation euphorique, juste dire: ça m'a plu, ça m'a
beaucoup plu!
D'autres, telle Auré, auraient dit que
c'était un de ces rares spectacles à avoir une âme!
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