Hommage à Derrida, le
philosophe porteur de pensées, le penseur de la déconstruction,
le guetteur de l'imprévisible, le voyant du promis
mais non assuré etc.
Hommage est fait, mais rien ne fait un hommage sans regrets.
Regret qu'il soit mort.
Regret qu'il n'ait pu poursuivre son oeuvre de déconstruction
dans et à travers la pratique d'internet.
Regret qu'il n'ait pu théorisé son
attachement au livre au-delà de la culture du Livre (comme
on dit les religions du Livre).
Regret également qu'il ait opté
pour la rigidité à l'égard de "la
grande langue française, plus intouchable que jamais",
écartant la déconstruction en ce domaine et donc toutes
perspectives de novation et de possibilités de
modification de la langue qui en a néanmoins
toujours connues.: Penser à Voltaire
réclamant
en son temps une grande réforme du "françois" qui
interviendra
presque un siècle après (1835). Ou bien penser au
Derrida qui formulait l'idée de mathématisation de
la langue en opposition à langue naturelle?
Regret qu'il ait adopté le cliché
du rejet du temps présent au contraire des années
1970, "cette
époque "heureuse" de naguère
où rien n'était irénique, certes".
Regret en effet qu'il se
soit rangé à des positions répandues ("...
dans un monde plus inégalitaire que jamais"... (qu'en
est-il de l'accès au savoir par exemple?)) sans
doute sous la pression d'un entourage officiel.
Qu'il doit être difficile à un moment
pour le penseur de rester seul, sans entendre les
voix qui crient sur l'air de tout savoir et d'avoir raison sur tout!
L'hommage à Derrida conduit à
traiter des bien-pensants de l'analogique. De ces
gens
qui ne pratiquent pas le numérique, n'utilisent pas ou peu
l'ordinateur,
ne se servent pas ou seulement avec défiance d'internet etc.
Ceux aussi pour qui l'écrit de l'internet ne
parait pas en être vraiment. Ainsi quand on dit à certains
d'entre eux qu'il y a de l'écrit sur internet, ils prennent un
air idiot pour affirmer que quand même ils
préfèrent lire Balzac ou Kierkegaard,
sans considérer qu'en un clic ou deux on peut trouver des textes
de ces auteurs.
On doit se rendre compte qu'à ce jour de fin 2004 en France une
majorité de personnes des diverses institutions intellectuelles
ou instances de pouvoir sont majoritairement des gens analogiques et,
plus précisément, des structurés mentaux
analogiques. État qui les conforte en une sorte de ressassement
puisque leur monde est par définition fermé à la
stricte figure du passé.
On m'objectera qu'on peut pratiquer le
numérique et rester analogique dans
l'âme, voire se revendiquer
archéo. Ainsi les intégristes de tous poils utilisent et
abusent d'internet pour la propagation de leur propagande.
Cependant ils restent enfermés dans leur monde fermé, au
contraire des structurés mentaux numériques qui portent
et vivent l'ampleur d'ouverture inouïe et sans égal du
numérique.
...