f | ||
texte 35 Sur les sociétés de la peur par Jean Pierre Ceton et Victor Cherre
L'écrivain-éditeur
Bernard Comment publie en date du 29/12/2010 Les sociétes de la peur
(swissinfo.com) dont voici quelques extraits:
« Notre monde développé est rongé par toutes sortes de peurs, savamment alimentées par des politiques désireux d’endosser le costume de sauveur... Les fêtes ne sont plus qu’un rituel vide, du moins pour un non-croyant, elles sont une survie emphatique d’un vivre-ensemble qui a perdu sa substance... Les habitudes demeurent, mais le sens s’est évaporé. Une crise de sens s’ajoute à la crise économique... La peur s’est installée. Je veux dire que, depuis une ou deux décennies, se sont développées des sociétés de la peur... L'école et plus généralement les services publics font peur, on cherche à culpabiliser chaque citoyen en laissant entendre que cela coûte trop cher, qu’il faut réduire, serrer les boulons. La santé fait peur, avec des pandémies sans cesse annoncées, avec des soins intensifs et des urgences en saturation. Les transports font peur, la météo fait peur. Les mouvements sociaux font peur. Demain fait peur... »
Nous, on
persiste à ne pas croire que notre
société soit si rongée par les peurs. D'abord le verbe est trop
fort, il renvoie aux rats ou à la peste brune. Et puis les peurs
contemporaines
dont il est question sont bien légères par rapport aux peurs du
passé, celle de l'an mil, des grandes épidémies, de la famine, la
peur des guerres, la peur sous l'occupation, la peur du péril jaune,
de l'atome et celle du cancer dans les années 60. Et même celle du
sida dans les années 1990... Y
a-t-il des acteurs politiques
qui depuis une ou deux décennies alimentent des peurs, celle de
l'étranger en particulier? Sans doute, peut-être plus en Suisse qu'en
France où ce n'est pas nouveau! Assez
curieusement certaines peurs sont moindre en raison des connaissances
nouvelles tandis que d'autres se renforcent en raison de l'accroissemnt
d'informations dont nous disposons. Il y a en tout cas dans ce texte une exagération des peurs, y compris à propos de l'école (qui doit assurer désormais une éducation massive) ou de la santé (budget 2,5 % du PIB en 1950, plus de 11% en 2009). Il y a une exagération et presque une démarche idéologique ainsi que l'illustrent ces affirmations: "il y a une crise du sens" ou bien "demain fait peur". Ce qui est inquiétant c'est qu'il pourrait être lu au second degré, comme une parodie du discours du Front national. Des gens de cette tendance pourraient souscrire à pas mal de phrases de ce texte, nourrissant ainsi ce discours-là. Ce n'est certes pas l'intention de l'auteur, bien au contraire. C'est
en fait symptomatique d'une classe intellectuelle en place de
croire devoir dénoncer la mauvaiseté de notre époque. Et cela selon une
tradition des clercs de trouver leur époque mauvaise. Du coup est
percue une menace dans tous développements ou transformations ou
novations. Y compris en impliquant l'existence d'une sorte de chef
d'orchestre comme l'expriment ces "On cherche à nous faire croire... On
voudrait nous faire croire que..." Bien entendu pour Bernard Comment cela oriente ses choix littéraires, c'est une couleur qui imprime le type de livres à paraître. Pas de livres qui explorent positivement cette époque mais des livres qui alors invitent à la nostalgie qu'on retrouve comme un courant de fond dans notre société.
|
||
05/01/2011
/
tous droits réservés / texte reproductible sur
demande / m. à j. 15/01/2011 |
||
La
page de jean pierre ceton Dans la francophonie continuer le français Analogiques versus numeriques : hommage à Derrida Pour une littérature numérique Détestation du mot bouquin Poursuivre l'expérience de la langue La question du support |
||
retour
page principale écrire à lettreaulecteur |