f | ||
texte 31 Le parcours d'un écrivain par Pauline Dezert et Alexie Virlouvet
Le salon du livre? Cela s'est toujours mal
passé. Le premier auquel je suis allé, c'était d'ailleurs le premier
salon au Grand Palais, j'étais en fâcherie avec l'éditeur de RLV qui
avait refusé mon second livre. Je me suis cependant rendu à son stand
pour le saluer, mon livre paru deux ans auparavant ne s'y trouvait pas.
En fait l'éditeur pensait que ce livre disparaitrait. Me souviens
d'ailleurs qu'il m'avait dit qu'il ne voyait vraiment pas ce que je
pourrais écrire après ce livre! Pour votre prochain roman? Son titre? L'Insatisfaction, le
narrateur est un personange féminin... J'ai envoyé les dix premières
pages imprimées à mes deux éditeurs historiques.
Le premier m'a écrit très vite m'indiquant qu'elle ne se sentait pas assez en affinité avec ce que j'écrivais pour le publier. Ce qu'il disait à chque fois depuis, que je seerais en droit de lui reprocher de ne pas bien défendre mon livre... Le second m'a envoyé un mail me faisait part de son enthousiasme pour ce début et me demandant de lui envoyer puis il m'a laissé trainer pendant huit mois. Je croyais qu'il hésitait. Il me disait qu'il lui fallait beaucoup plus de temps. Je pensais qu'il était sous pression de sa mère. En fait il était devenu président de la commission d'avance sur recettes du cinema et il avait donc un emploi du temps démentiel comme il me le confiera plus tard. Et au bout du compte un mail envoyé pour dire que "le roman n'a pas de cohérence, que la lecture ne prend pas". Comment se fait-il que vos derniers livres soient épuisés, ou introuvables? Ça s'explique par l'absence d’éditeur. En fait
c'est Duras qui m'a édité les deux premiers livres chez Minuit et
Pol et ensuite, entre autres, Mathieu Bénézet dans des collections
éphémères qui ont disparu, ou bien le petit éditeur (Henri Poncet
de Chambéry). Les livres qui restent sont en vente sur les libraires
du net. Cinq d'entre eux sont en aperçu et en édition numérique
sur Google Play. On peut donc au moins en lire des extraits de
n’importe quel endroit de la terre. Mais j'espère bien qu'ils
seront réédités pour revenir chez les libraires... Mon travail
doit être propice à des incompréhensions avec les éditeurs. Par
exemple Jérôme Lindon me disait qu'il ne voyait vraiment pas ce que
je pourrais écrire après Rauque la ville qui n'était pas la
littérature de son choix... J'aime les livres papier, le numérique
n'est pas un choix délibéré mais une voie de secours en attendant
mieux ! Une héritière de plusieurs générations d’éditeurs de littérature, soeur d’un éditeur présent sur la grand place, avait rejeté mes « Nouvelles du passé » : Surtout pas ça, elle ne prendrait pas ça, elle ne publierait jamais ça ! Si Jean Pierre Ceton n’était pas chez les grands éditeurs après ses deux premiers livres publiés par Duras, c’est que ce qu’il avait écrit depuis était mauvais. C’est vrai ''ça'' ne correspondait pas à ses choix d‘éditrice pour une littérature journalistique... Retour arrière. Mais alors « La Suive » ? Et « La Fiction d’Emmedée » ? Et « Le Pont d’Algeciras » ? AV- J'ai repéré quelques phrases dans tes notes: MD disant que l'auteur le plus important de sa maison d'édition lui demande de publier un auteur et... Ça c'est dans Libération
Il se prend pour flaubert
Rememo soudain de
l'éditeur Pol, je suis obligé de vous dire en tant que
professionnel que vous ne pouvez pas faire ça. Je faisais apparaitre
un personnage à la première page de La Suive, le faisait disparaître
au bout de dix pages et on ne le revoyait plus des trois cents à
venir.
Manifestement OC n'était pas entré dans le livre. Retour du livre pas même signé par lui, non : Le comité de lecture. On dirait une lettre de gens incultes. Je me demande s'il l'a vraiment lu ? Une grande déception, je comptais sur son intelligence qui aurait pu lui entremettre qu'il y en avait dans ce roman. En fait il s'en était tenu à son princi^pe de base, un langue stable. Il aurait fallu que l'écriture soit tenue, pour que ça fonctionne. Justement le contraire que je epsnais. Bon il avait raison j'avais lâche l'écriture. Elle n'était pas tenue à son sens. Mais c'était jsuemtent parce qu'elle n'était pas tenue que ça pouvait marcher. Que quelquechoes pouvait se déclencher. de sorte qu'il aurait pu opérer un sursaut et lire quelque chose qui n'était pas de son registre, eh bien non. Si l’écriture avait été tenue, m'écrit-il, alors cela aurait pu fonctionner ! C'est parce que l’écriture est ouverte, qu'elle permet de sortir du champ et qu'ainsi une autre fiction peut fonctionner. Sinon le sens est verrouillé par l’écriture formatée et normée.
Pauline D- JPC, on se lance dans l'histoire de votre parcours éditorial?
JPC- Enfin
ce n'est pas de misère dont je veux parler mais plutôt
du parcours d'un écrivain... car ce parcours éditorial on pourrait avec
le temps le trouver pas si mal, en son début en tout cas. Un 1er livre
publié aux éditions de minuit avec une préface de MD... Alexie V- Alors on peut commencer par un épisode récent qui n'a pas avoir tout à fait avec les éditeurs? Ah oui je crois C.W. Qui est écrivain a et avec qui j'étais ami, et qui d'ailleurs m'a aidé à publier La Suive elle avait parlé de ce livre, elle en avait lu le manuscrit- elle avait tenté de sensibiliser Pascal Quignard qui était installé dans sa maison d'édition de l'époque où il avait un bureau à l'entresol, plafond bas pied au-dessous du sol. Je n'aurais pu lui apporter que des ennuis, il préférait s'occuper de ses affaires et puis nous avions une sorte de conflit intellectuel, il avait publier Carus un an avant Rauque la ville... L'un était clairement orienté vers le siècle passé l'autre vers un avenir inconnu AV- Ça c'est un sujet sur lequel il faudra revenir... PD- Mais l'épisode C.W.?
JPC- Donc
en 1993 j'écris un livre de retour des trois mois passés
en Amérique du nord. Je lui propose de le lire, lui apporte chez elle, et un jour voici que le
manuscrit me revient par la poste, avec une simple phrase écrite
sur un post-it: "T'as dit quoi?" Ensuite nous ne nous sommes plus croisés ou bien elle continuait d'être fâchée contre moi. Il y a peu, je la croise et je lui dis l'affaire, que des amis me poussaient à lui dire depuis des années. Elle dit mais je l'avais fait lire à une amie on avait repéré précisément mon appartement dans tes descriptions. C'est vrai que je décris peu mais tout de même en effet les lieux m'étaient inspirés par ceux dans lesquels j'avais vécu là-bas...
Je
voudrais lui dire elle ne sait pas qu'en fait pendant des années
j'ai cru que tout simplement elle pensait que mon livre était
mauvais... Alexia V- Tu dis toujours que sans MD ton 1er livre RLV n'aurait jamais été publié... JPC . Oui il ne le serait toujours pas, et moi non plus. D'ailleurs il avait été proposé à d'autres éditeurs qui l'avaient rejeté comme météorite pour le moins. Chez Gallimard, le directeur de collection contacté lui me reprochait des trucs maintenant ridicules. Par exemple il disait qu'on ne pouvait écrire info avec un s, les infos, ce que tout le monde fait maintenant. Pauline D- Ensuite, Minuit a refusé ton 2nd livre?
JPC- Oui
il faut dire que ce que je n'ai appris que bien plus tard, qu'il
refusait toujours le second livre de ses auteurs. Certains le
supportaient et et moi non, je me suis fâché avec lui.
Il faut dire aussi qu'il m'avait dit aussitôt la publication de
RLV qu'il ne voyait vraiment ce que je pourrais écrire
ensuite, sous entendu "après un livre pareil"...
|
||
20/02/2010 tous droits réservés / texte reproductible sur
demande / m. à j. 20/02/2010 |
||
La
page de jean pierre ceton Analogiques versus numeriques : hommage à Derrida Pour une littérature numérique Détestation du mot bouquin Poursuivre l'expérience de la langue La question du support |
||
retour
page principale haut de page écrire à lettreaulecteur |