La durabilité de l'inscription
par Alexie Virlouvet
L'un des thèmes des "Voyageurs
modèles" de Jean Pierre Ceton est celui de la nécessité de la
désinscription. Il l'a développé oralement à
travers l'exemple de la clôture enlevée.
Dans un maison de paysan, une courette
est séparée d'un grand jardin potager par une clôture
en grillage, tandis qu'une simple barrière permet de passer de
l'un à l'autre de ces espaces.
Un jour une jeune urbaine, sans doute
parce que le potager avait été remplacé par un
gazon, décide d'enlever la clôture ainsi que la
barrière. Du coup il n'y a plus de séparation entre la
courette et l'ex potager devenu petit parc planté d'arbres
fruitiers.
Que se passe-t-il avec le chien de la
maison?
Le chien, fort de l'habitude acquise
depuis toujours de pénétrer dans le potager par la
barrière si elle était ouverte, continue de passer pour se rendre
de l'autre côté à l'endroit
précis de l'ex barrière pourtant disparue. On ne sait
combien de temps le chien a continué ce parcours, sans doute que
progressivement il en a dévié, à moins qu'il
soit mort avant.
Il en est ainsi pour de
nombreux rituels dont la perpétuation s'inscrit souvent hors de la
raison qui les avait fait s'installer comme tels.
Dans le social, les
modes de relations autant que les rapports hiérachiques se
reproduisent sans entraves ou bien s'actualisent très peu.
Dans les rapports
homme-femme on peut voir combien l'inscription du machisme
reste vivace, au mieux comme il en est sur un disque dur de fichiers
malgré leur effacement.
Plus surprenant encore est
la force de l'inscription du comportement féminin, correspondant au
machisme, qui perdure ou resurgit même là ou le
comportement machiste semble avoir disparu...