La
vision stable est sans doute la grande erreur qui menace tout raisonnement et
jugement sur notre temps présent. Et ceci est vrai en amont
comme en aval.
Ainsi une observation effectuée à
un moment de l'histoire n'implique pas que les choses aient été
constantes auparavant. Une peuplade étudiée par des ethnologues en 1910
n'avait pas forcément les mêmes rites des siècles plus
tôt. Ni depuis les débuts de tous les débuts...
Il
y a des contrées ou l'on découvre des villages encore
intacts, entend-on, comme si ils avaient toujours été
dans le même état!
Étant entendu qu'en général ils ne sont plus du tout ce
qu'ils étaient il y a un siècle,
même si certains peuvent paraitre conservés tandis que d'autres
sont désormais étouffés d'urbanisation.
Il
est certain, peut-on lire, que l'on connaîtra une perturbation des régimes climatiques auxquels on
s'est habitué. Ce qui semble impliquer que le climat aurait été identique depuis 30, 50 ou 100 ans!
Comme si celui des années 1950 était comparable à
celui que nous connaissons depuis quelques années...
Multiples sont ces phrases comme celle-ci encore: "Il y a vingt ans, il ne pleuvait pas dans ces
coins-là" qui ne peut pas signifier qu'il n'avait jamais plu auparavant...
"Il
est de plus en plus difficile de trouver des places de
crèche dans les villes de province"... là où il n'y
en avait jamais eu cinquante ans plus tôt... "Conservons
les prairies et protégeons-nous de l'artificialisation du
paysage", sachant cependant que les prairies à un moment étaient artificielles bien qu'elles aient pris avec le
temps l'aspect d'être naturelles...
En
aval, les projections que l'on peut faire dans des domaines peu
quantifiables sont totalement incertaines trop basées sur une
vision stable. Ainsi ce «Des conflits énormes se
préparent» en titre d'une réflexion
de Hubert Védrine, titre qui d'ailleurs ne reflète pas
son contenu. Certainement que cette affirmation est vraisemblable
si l'on projette des données présentes. Mais elle
n'implique pas qu'elle le soit demain car on peut
difficilement prendre en compte un certain nombre d'évolutions,
celle du climat mais aussi celle par exemple du comportement des
femmes dans le monde et de l'accroissement de leur rôle.
Ainsi
la prévision affirmée d'un niveau de population
mondiale à 9 milliards d'humains en 2030 doit tenir compte des
prévisions faites dans les années 1970 d'une population
mondiale qui se serait élevée à 10 milliards en
2000...
Il y a toute chance pour ce qui sera demain ne sera pas ce
qu'on croit aujourdhui. Tout comme ce qui était hier n'est pas
etc...
Il n'y a jamais eu de monde stable non plus, ni de climat constant, pas davantage un monde tout bien avec une nature "harmonieuse".
Les hommes premiers (?) dont on dit qu'il vivait en harmonie avec la nature devaient lutter contre les forces de cette nature, appelées les "éléments" jusqu'au
cours du XXe siècle, quand elles étaient
déchainées, avaient appris par nécessité
à s'en accomoder pour survivre...