L'auteur
des Bienveillantes (d'ailleurs pas
bienveillantes du tout) a livré sa vision de la
littérature
à l'occasion et à propos d'une récente tuerie sur un campus américain ayant
entraîné la mort de dizaines de personnes.
Littell
préparant par là, on peut l'imaginer, Les Bienveillantes
2 (qui ne le seraient pas
davantage) -que les académiciens français
se tiennent donc prêts à lui remettre un deuxième
prix-... s'intéresse en particulier aux écrits -si l'on peut dire- du
tueur pour illustrer l'idée selon quoi la littérature impliquerait de
faire sortir ce qui devrait l'être à la façon d'une
éruption de boutons, comme on dit crever l'abcès... Ecrits si l'on peut dire,
en réalité travail d'étudiant en cours de théâtre, qui seraient
malgré leur faiblesse intéressants selon lui car ils écriraient
quelque chose qui sinon n'aurait pas été écrit, en
particulier de cette sombritude de l'humain...
Drôle de vision de la littérature, l'écrivain serait
contraint d'écrire des textes comme le meurtrier de commettre le meurtre. Sans doute Littell a-t-il trop
étudié Bataille à l'université au point
d'être scotché à une théorie d'un autre
siècle. En tout cas l'a-t-il trop étudié de façon cannibale car il se
réclame de Bataille pour mieux défendre sa
vision pseudo
bataillienne de la littérature, celle qu'il a
développée
en imaginant les confessions d'un officier nazi, dont il semble
retrouver le chemin
dans les mauvais écrits d'un perturbé total devenu
meurtrier odieux autant qu'imbécile.
Vision
d'un autre
siècle, celle qui privilégierait le Mal en tant que damnation de l'espèce humaine face au Bien des gens honnêtes ou du pouvoir ecclésial.
Vision
d'un autre
siècle, comme celle qu'exprime la phrase de Breton sur l'acte le plus
surréaliste qui était de sortir dans la rue en tirant
de tous ses revolvers... Phrase qui n'est sûrement pas possible
aujourd'hui à prendre au pied de la lettre et qui est devenue
bien difficile à endosser pour les admirateurs de Breton. On ne
sait pas si elle était davantage supportable à son
époque... mais le monde
a changé semble-t-il, au point que l'on préfére
inviter à sortir dans la rue en appelant de tous ses
téléphones.
D'un autre siècle, comme ce à quoi renvoie le bidet de Duchamp qui restera en effet de son siècle,
car les bidets ont quasiment disparu des mobiliers de salle
de bains. Et le rôle qu'ils jouaient dans la société des années 1900 est même carrément oublié.
Il n'empêche que l'écrivain doit être souverain...